Geisha

Le rôle confus des Geisha

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Il semble que le concept de geisha entretienne un certain nombre d'idées reçues en occident, en particulier autour du rôle parfois décrié de ces femmes. On entend régulièrement que les Geisha seraient systématiquement des escort girls voire des prostituées et notre article va notamment chercher à faire le point sur cette épineuse question.

À l'origine, le terme geisha signifie littéralement "pratiquant des arts". Il fut introduit au milieu du XVIIIè et regroupait alors des hommes aussi bien que des femmes censés divertir les clients des お茶屋 ochaya (maisons de thé). Les geisha, très raffinées, devaient maîtriser de nombreux arts traditionnels japonais (musique, danse, cérémonie du thé, art floral...) et posséder une excellente culture générale pour suivre et prendre part dans tous types de conversations. C'est encore le cas aujourd'hui. Le métier fut reconnu officiellement par le gouvernement en 1779 et leur interdit la prostitution, qui par ailleurs ne sera proscrite au Japon que plus de soixante ans après, puis totalement interdite en 1957.

Garantes de la tradition japonaise, les geisha n'ont cessé de voir leur nombre décroître malgré un très léger regain ces dernières années. De nos jours, on n'en trouve guère plus qu'à Kyoto où elles sont connues sous le nom de 芸妓 geiko, alors que leurs apprenties sont des 舞妓 maiko. Elles sont regroupées dans une ces cinq 花町 hanamachi (littéralement "villes de fleurs") que sont Gion, Pontochô, Miyagawachô, Kamishichiken et la désuète Shimabara.

Dames de compagnies, simples prostituées en kimono ?

La dérive de l'acception perçue en Occident pourrait provenir de diverses raisons et abus de langages :

  • le maquillage blanc sur leur visage des jeunes et le port du kimono avec obi peuvent être confondus avec la tenue Tayû / Oiran, des courtisanes de haut rang (ou prostituées de luxe) de la période Edo (1603 - 1868) ;
  • dans la culture populaire des années 2000, le film Mémoires d'une Geisha a porté le roman à la sauce Hollywood en abordant parfois maladroitement la thématique difficile des femmes de réconfort pendant la guerre, sujet qui a encore fait débat récemment à Angoulême ;
  • l'accessoire sexuel "boules de geisha", pour la stimulation ou la musculation, ne connaît ce nom qu'en occident et particulièrement en langue française, alors que son origine relève du taoïsme et du tantrisme.

Il n'est pas dit formellement que les geisha ne peuvent pas avoir de relations sexuelles avec leurs clients, mais cela est toujours resté officieux pour des questions de prestige et d'élégance. Même le danna, riche mécène / protecteur censé apporter la stabilité financière à une jeune femme, n'achetait parfois la virginité d'une geisha que pour des questions de réputation et pas forcément pour en bénéficier physiquement.

Les geisha ne sont plus recrutées comme à l'époque et la démarche volontaire de suivre cette formation semble de moins en moins interférer avec le célibat, auparavant condition sine qua non jusqu'au mariage qui signait la fin de la position de geisha.

Vie d’une Geisha à Kyoto

Il semble donc y avoir énormément de fantasmes autour des geisha japonaises, héritières de traditions séculaires dont le gaijin ne sait plus trop bien ce qu'elle est réellement dans le Japon d'aujourd'hui. C'est sans doute la raison pour laquelle on entend souvent qu'elle sont des escort girls de luxe (voire, pour certains, des prostituées maquillées).

Si vous êtes en voyage au Japon, le plus simple est de déambuler dans les quartiers de Gion ou Pontochô à Kyoto, où elles se déplacent fréquemment pour se rendre dans les Okiya (置屋 les maisons de Geisha). Attention : les Geisha / Geiko / Maiko n'aiment pas beaucoup être prises en photo. Evitez donc d'être ce touriste pénible qui les mitraille avec le flash en les suivant à un mètre.

Garantes de la tradition japonaise, comme c'est toujours le cas aujourd'hui, les Geisha / Geiko suivent une éducation particulièrement précise en arts (cérémonie du thé, arrangement floral, ikebana...) et musiques traditionnelles (shamisen, taiko...) voire parfois en danse. Leur rôle est celui d'une dame de compagnie, principalement pour des déjeuners entre riches hommes d'affaires.

Le costume des Geisha est constitué d'un kimono 👘 de soie fabriqué à la main (dont le coût dépasse fréquemment 500.000¥ / ~3.043€), d'une large ceinture de soie nouée dans le dos (obi), des chaussettes (tabi) et des sandales de bois (geta). Leur visage est maquillé de blanc à base de poudre de riz, jusqu'à la nuque. Visuellement, on peut les confondre avec les Oiran, des courtisanes dont l'origine remonte avant les Geisha.

Glen Milner a eu l'opportunité, pour le journal anglais The Telegraph, de suivre une Geiko / Geisha de Kyoto, Miehina, pendant une journée. La superbe (mais courte) vidéo qu'il en a tiré vous propose d'en apprendre un peu plus :

Mis à jour le 27 octobre 2020 The Geisha's confusing role