La dictature des audiences sur un site
Trafic et visiteurs pour un webmaster
C'est un sujet qui divise fatalement. Parce qu'il implique une question d'éthique, mais aussi parce qu'il touche au succès, notion que, dans beaucoup de pays latins, on ne peut s'empêcher de jalouser. Je voulais aborder cette fois la question du trafic d'un site web et son impact sur le webmaster. Et je vais commencer par préciser que, même si je vais évidemment m'appuyer sur ma propre expérience et les chiffres de Kanpai, je ne divulguerai rien de précis sur les résultats.
Comme beaucoup de sites, Kanpai a connu une progression quasi constante de sa fréquentation depuis qu'il est en route. A cela, on peut trouver plusieurs raisons :
- l'augmentation de la fréquentation du web, forcément, via son über-démocratisation et la multiplication des points d'accès (notamment mobiles, ces dernières années) ;
- un intérêt croissant de la population pour les thèmes abordés sur Kanpai depuis 10 ans, notamment le jeu vidéo (merci la mode casual inspirée au milieu des années 2000) et la société japonaise dans sa globalité ;
- un coup de collier progressif de ma part qui génère une publication de plus en plus régulière (en ce moment, un article par jour en moyenne), ce qui crée du nouveau trafic et alimente le cercle vertueux ;
- et puis une connaissance plus affutée de ma part de la manière de mettre en lumière mon contenu et de le valoriser sur le plan organique, c'est à dire lui assurer une pérennité SEO.
Résultat : j'ai connu ces derniers mois (également grâce au passage sous Wordpress) une croissance intéressante qui m'a fait tomber les records de fréquentation de Kanpai les uns après les autres. Je note en passant que chaque record battu devient une norme et, dès que le trafic connaît une petite baisse (toujours meilleure que 2 semaines plus tôt), on a l'impression que le site est sur le déclin... Enfin, cela occasionne surtout de nombreuses questions et surtout de nouvelles approches.
D'abord, à quoi ça sert au juste de faire du trafic ? Au-delà de la satisfaction personnelle (totalement stérile), il y a un début de reconnaissance des interlocuteurs, une multiplication de la demande de liens (pour ma part quasi systématiquement refusée) et des spams évidemment, un intérêt plus marqué de la part des régies publicitaires, ou encore de plus en plus de facilité à recevoir des jeux à tester, des DVD ou des invitations à des évènements / soirées parfois non sollicités.
Je m'aperçois de plus en plus qu'on fait confiance à ceux qui font du trafic, ceux que l'on met bien volontiers dans la case "leaders d'opinion". Évidemment, je suis loin de considérer le modeste Kanpai comme tel. Mais alors dans quelle mesure peut-on dire que plus un site fait de l'audience, plus il est qualitatif ? C'est d'ailleurs souvent faux : combien sont les sites agrégateurs de bases de données, ou tournés vers des sujets légers, à avoir des volumes impressionnants (on les reconnaît vite, ceux qui succombent à la tentation du trafic facile, de la publication sans plaisir) ? Et dans le cas de sites éditoriaux, je constate de plus en plus ce que remarque Eric de Presse-Citron depuis longtemps déjà : plus un site est fréquenté, plus le nombre de pages vues / visite baisse.
Il est donc capital de ne pas s'intéresser qu'aux indices globaux (nombre de visites et de pages vues) mais de s'attarder aux comportement détaillé des internautes qui visitent un site, grâce à des indicateurs plus précis : taux de rebond, visiteurs uniques, pages d'entrée et de sortie, répartition des sources... L'objectif étant de comprendre comment capter l'attention puis l'intérêt d'un visiteur afin de qualifier sa visite, lui donner envie de lire d'autres pages du site et d'y revenir plus tard (fidélisation). En termes de transformation, ce sont ces visiteurs-là, et non ceux de passage en coup de vent, qui représenteront une rentabilité intellectuelle et financière pour un site web.
Le vrai nerf de la guerre n'est pas le quantitatif, mais bien le trafic qualifié. Le plus rare, naturellement.