Samurai Champloo
Ouf ! Samurai Champloo nous dévoile enfin ses derniers épisodes, après une mise bas pour le moins chaotique. La dernière production WATANABE, forte d'un Cowboy Bebop encore adulé, a en effet subi les affres d'une diffusion mouvementée sur les chaînes japonaises. À l'image de leur grand frère, les Champloo ont donc passé les deux tiers de la saison chez Fuji 🗻 avant de migrer, non sans une pause de plusieurs mois, chez un BS de la même boîte mais sur le câble payant. Raison invoquée : de la peine à trouver un audimat. Assez effrayant, pour une série de cette trempe. En effet, Manglobe a sorti l'artillerie lourde, et a surtout encore une fois glissé sa patte tout au long des épisodes. Faute de space opera à la sauce cow-boy, le réalisateur à succès frappe à coups de rônin breakers forts en gueule, en style comme en anachronismes.
SC se pointe au sein d’une production récemment avide de chambara. Pourtant, sans être mis en scène de manière anti-traditionnelle, l'animé se permet des pieds de nez à la WATANABE : synchronisation de l’image et du son jusqu'au scratch visuel euphorique et surprenant ; sortie littérale de la bobine de l’animé pour annoncer un flash-back ; qualité d'animation encore une fois plus qu’au top ; chorégraphies superbes qui dépassent techniquement, dans un style différent, celles de CBBB ; etc. Et surtout un rythme de road movie mi-mélancolique mi-funky, qui n'avance à rien et nous colle aux épisodes, jonglant de manière déséquilibrée entre inutilité avouée de celui-ci et intérêt exceptionnel de celui-là. Un beau dilemme, tout WATANABE qu'il est, et fort enthousiasmant.
L’ensemble de l’aspect visuel s’articule autour d’un format 16/9è efficace. Dans le cadre, un design des personnages puis une esthétique globale d’un style cohérent et inimitable. Les graphistes maîtrisent leurs traits et le nuancier, et dans leur dos les animateurs se fatiguent à nous offrir une fluidité et une qualité irréprochables. À travers les détails de mouvements dans une animation parfaitement différentielle, l’image ne semble que très rarement fixe : tout paraît toujours en mouvement et l’ensemble vit d’un dynamisme impeccable. Plusieurs types d’arts martiaux sont proposés au long des épisodes, du pur classique au plus loufoque. Tous, pourtant, rapporteront les suffrages de nos rétines, à ceci près que leur qualité vaut leur défaut : l’on en voudrait beaucoup plus et d’une durée plus conséquente à chaque fois.
Là encore où Samurai Champloo a pu faire jaser, c’est dans son accompagnement musical résolument axé hip-hop. Si a priori, on peut le penser comme un choix douteux, force est de reconnaître bien vite que les pistes choisies collent parfaitement à tout l’animé. À tel point, d’ailleurs, que l’on se prend à se demander quel autre style musical aurait pu le faire aussi bien. Dans l’ensemble, les morceaux régalent et certains resteront en tête, à l’exception des génériques un poil décalés. Bien entendu, le tout est offert loin d’un mono, ce qui servira autant la bande-son que le doublage efficace. Un personnage très secondaire va même, en guise d’accompagnement musical, jusqu’à beat boxer avec le bout de son sabre. Très bon.
Dans ce Japon médiéval traité façon XXè, WATANABE peut s'en donner à cœur joie et taper à droite à gauche. Ici il invente des rastas rappeurs bandits de grand chemin, là un petit monde de bonzes blasés et raides défoncés qui font pousser des hectares de canna. À la manière du Bebop, chaque épisode est construit comme une petite OAV. La plupart ne suivent le fil rouge (la quête du samurai qui sent le tournesol) que de très loin. D’autres se penchent plus précisément sur nos trois lascars. Mais dans l’ensemble, la touche CBBB est plus que présente, et il est plutôt question d’ambiance que d’hégémonie du scénario.
Technique, bande originale, histoire, humour... tout y est, avec un niveau de style ébouriffant. Samurai Champloo explose les rétines et les oreilles avec une classe folle dont il serait fort dommage de se priver. Recommandable à tous, il sera apprécié en priorité par les cow-boys de l'espace. Allant jusqu’à égaler son prédécesseur, cette nouvelle série du grand WATANABE frappe fort et pose son flow sur une japanimation ébahie. N’imitez pas l’imbécillité d’un public endimanché, et ruez-vous sur un bijou de cette trempe !