Genshiken (animé)
Gendai Shikaku Bunka Kenkyuukai
Une brochette d'otaku rassemblés pour suivre le Xième épisode d’un animé débile. Il y a le timide transparent, le pervers assumé, le gros qui bégaye et le mignonnet dont on ne pense pas qu’il aime ces débilités. Sur l’écran qu’ils scrutent la bave aux lèvres, des gamines guerrières dont les pieds sont aussi longs que leur tête énorme et qui, malgré leur dix ans d’apparence (et d’âge mental), ont la poitrine d’une cover girl de Penthouse. Face à cette scène, il y a trois possibilités :
- vous participez chaque semaine à ce genre de rencontres, ne manquez pas une convention et vous êtes déjà masturbé sur des fillettes qui ne sont que des traits de crayon avec des couleurs dedans ;
- vous connaissez le phénomène depuis un petit moment, le comprenez plus ou moins, mais ces gens vous font quand même un peu peur et vous n’aimeriez pas les croiser seul dans une ruelle sombre en rentrant chez vous un soir ;
- vous ne connaiss(i)ez pas et allez soit lire cet article honteux sur Yumeria, soit rejoindre la guilde mystérieuse du sieur Raton.
À cause du studio Genco, il faut désormais compter sur un quatrième choix : la mise en abîme. Genshiken est le premier animé didactique de l’otaku (terminologie qui, cela semble se confirmer, définit autant la personne atteinte que la passion qui la touche). La bande d'adulescents rivés à l'écran est donc la projection de ceux qui regardent l'animé, et l'animé qu'eux-mêmes regardent est Kujibiki Unbalance, alias Kujian, une série de trois OAV produite en 2004 par le studio même qui réalise Genshiken. La boucle est bouclée. Et l'animé bourré de petites références du même type, qui plairont aux... otaku. Dans le genre, on a donc des plans sur le magazine Animage et des jeux comme Guilty Gear Isuka ou Puyo Puyo Fever (dont on voit même la jaquette, ça pue la publicité incrustée), et ce bien que la manette soit estampillée SANY. Mieux encore, OHNO Kanako, l'inévitable personnage niais aux gros nénés, est doublée par la même seiyû que Mahoro. Fan de cosplay, OHNO se déguisera notamment en Automatic Maiden. C'est le genre de clin d'œil amusant pour les connaisseurs, et je suis sûr que vous en trouverez encore beaucoup plus que moi.
Genshiken fait donc semblant d'être vu par les yeux du personnage qui ouvre la série en rejoignant le club et qui, de même, est présenté comme le protagoniste sur le site officiel. En fait c'est plutôt à travers KASUKABE, l'« anti » du groupe, que seront traités les sujets de Genshiken. Une pirouette efficace pour mélanger didactisme et jargon otaku, en passant par tous les lieux obligés : le Comic Festa, la convention de cosplay, le montage de Plastic Model, la plage 🏖 pour montrer son quota de peau, etc. SASAHARA, le perso du début, a deux lignes et demie par épisode. De toute façon, il est aussi mou du genou que la moitié de l'animé. Car hormis les quelques réjouissances citées plus haut, Genshiken dévoile vite ses limites. D'abord, il est techniquement très limité, tant graphiquement que dans son animation, et je ne parle pas de la bande son. Passe encore. Mais certaines scènes sont tirées en longueur jusqu'à en devenir infernales. J'ai parfois eu l'impression que les animateurs luttaient pour atteindre la fin d'épisode, impression qui prend son acmé avec le neuvième. Pendant vingt putain de minutes, on a seulement deux personnages dans leur petit local, dont l'une ne parle pas et l'autre trippe tout seul (en bon allergique aux filles qu'il est) et passe la moitié de l'épisode à se demander comment il va lui dire qu'elle a un poil de nez qui dépasse...
Je suis relativement mitigé concernant Genshiken. Certains passages sont agréables à regarder, voire intéressants si l'on s'intéresse au phénomène, mais d'autres absolument (inter)minables. L'animé passe de saynettes amusantes (les passages en dôkyusei, la déculpabilité de lire du dôjinshi, etc.) à de grosses déceptions. Les titres des épisodes, qui ressemblent à ceux des articles de l'OMNSH, sont alléchants mais ne traitent pas le sujet au centième. En fait, comme « Genshiken » pour « gendai shikaku bunka kenkyûkai » (« société d'étude de la culture visuelle moderne »). Et lorsque l'animé qui traite d'otaku et de produits dérivés vend lui-même aux otaku ses produits dérivés, j'ai tendance à y trouver comme un gros foutage de gueule, ou au mieux une hypocrisie bien lâche. Pour ceux qui aiment, en tout cas, ne soyez pas déçu de l'absence de fin. Genshiken n'a peut-être pas de fil conducteur ou de but, mais une seconde saison est d'ores et déjà prévue pour l'automne 🍁 2006.