Matou : court-métrage japonais hypnotique
Matô avec Karia Nomoto, de Isamu Hirabayashi
Ceux qui suivent Kanpai sur Facebook ou Twitter ont déjà pu voir ce court-métrage fin mars, lorsque j'ai relayé sa diffusion sur Arte. Il s'agit d'un film de quatre minutes, réalisé par Isamu Hirabayashi et présenté lors de l'édition 2011 du film court de Sendai.
Je vous propose, avant d'en parler, de regarder la vidéo de Matou dans les meilleures conditions possibles : en entier, en plein écran, en haute définition et avec le son au maximum :
Car il y a une sorte de spoiler dans la discussion autour de ce film. Le spectateur comprendra plus ou moins rapidement que la protagoniste rajeunit en fonction de sa connaissance des codes de la société japonaise.
Irabayashi fait porter à l'actrice Karia Nomoto, successivement, les habits qu'une femme japonaise peut être amenée à porter pendant sa vie : robe de mariée, uniforme d'écolière, de lycéenne, d'office lady, cosplay, tenue funéraire, gal, femme au foyer, à la retraite, uniforme de maid café, jusqu'à la couche-culotte !
A mesure que cette note électrique lancinante monte en tonalité, en volume et en intensité, la femme japonaise enchaîne les tenues avec une régularité métronomique, comme la fuite en avant d'une vie codifiée qui la conduit irrémédiablement à la fin qu'est son début.
Dans un pays où l'omnipotence du statut social se définit notamment par le code vestimentaire, Matou rappelle à tous que la personnalité s'efface derrière le visuel, le superficiel. Karia Nomoto, emmurée dans un silence et un stoïcisme glaçants, montre que les costumes, tout puissants qu'ils soient, ne sont qu'apparat de relations sociales sur le corps nu qui y perd sans doute une part de son identité.
Elle n'échappe pas, cependant, à ce léger balancier qui la sépare de l'immobilisme pur, comme pour prouver que l'espace de liberté du ça (à l'extrême inverse de l'hégémonique surmoi japonais) se contient dans l'écrasement créé par le costume, quel qu'il soit.
待とう Matou... Attendons...