Cat's Eyes TF1 (avis)
Présentation et critique de l'adaptation française télévisée
La série "live" française Cat’s Eyes est l’adaptation en une 1ère saison de 8 épisodes du fameux animé japonais des années 1980, et diffusée sur TF1 depuis le lundi 11 novembre 2024. Le succès d'audience étant au rendez-vous, la chaîne de télé a décidé de prolonger le plaisir des spectateurs jusqu’au 9 décembre et de valider 2 saisons supplémentaires.
À la télévision française, l’adaptation de Cat’s Eye a trouvé son public dès les 2 premiers épisodes avec 5 millions de téléspectateurs, et les 2 suivants ont captivé 4 millions de fidèles. On peut donc dire que l’ambition de TF1, qui produit ainsi la série la plus chère de son histoire avec 25 millions d'Euros de budget, a été récompensée d’autant plus que 2 autres saisons ont d’ores et déjà été signées.
La série animée Cat’s Eye, régulièrement diffusée en France et disponible en replay sur TF1+, est teintée de nostalgie et a durablement marqué l’imaginaire des jeunes téléspectateurs depuis bientôt 40 ans. L’anime original compte 73 épisodes et narre les aventures des sœurs Sylia, Tamara et Alexia Chamade (Rui, Hitomi et Ai Kisugi en version originale), gérantes d’un café le jour et voleuses d’œuvres d’art la nuit dans le Tokyo des années 1980.
Leur activité clandestine vise à retrouver la trace de leur père, un artiste allemand mystérieusement disparu quelques années auparavant. Leur caractéristique est de toujours prévenir leurs cibles avant de les cambrioler, avec une carte de visite siglée "Cat’s Eye", et de faire tourner en bourrique la police tout en offrant une action spectaculaire. Des éléments de comédie apportent de la légèreté à l’intrigue, comme le personnage de Quentin (Toshio), inspecteur de police dévoué à son métier mais plutôt maladroit et amoureux invétéré de Tam.
Le 1er succès de Tsukasa Hojo et ses adaptations
À l’origine, Cat’s Eye est un manga, publié au Japon entre 1981 et 1985, avant d’être adapté en animé entre 1983 et 1985. C’est le premier succès de Tsukasa Hojo, plus connu chez nous pour être l’auteur de Nicky Larson (City Hunter). Ce dernier a été d'ailleurs décliné en plusieurs films :
- à Hong-Kong dans Niki Larson, avec Jackie Chan en 1993 ;
- le loufoque mais non moins réussi Nicky Larson et le parfum de Cupidon, en 2018 par Philippe Lacheau ;
- la plus sérieuse et très solide version japonaise City Hunter sur Netflix cette année ;
- et même en drama coréen en 2011.
Quant à Cat’s Eye, le manga a été adapté 2 fois en prises de vue réelles au Japon, avec un téléfilm en 1988 puis un film en 1997, mais la série de TF1 est la première adaptation en dehors de l’archipel.
À noter également que, surfant potentiellement sur cette popularité retrouvée, un nouvel animé Cat's Eye est prévu pour une diffusion sur Disney+ en 2025.
Si les itérations de Nicky Larson ont principalement joué sur la fibre comique, pour Cat’s Eye, l’auteur avait à cœur que l’esprit de son manga soit respecté. Les porteurs du projet d’adaptation ont ainsi passé 5 ans à négocier et à le convaincre, lui et son équipe, pour proposer d’explorer une autre facette de l’histoire : comment les sœurs Chamade sont devenues les Cat’s Eyes. Tsukasa Hojo a tenu à ce que la nouvelle série respecte un certain cahier des charges :
- les sœurs ne devaient pas porter d’armes ;
- ni être présentées comme des voleuses appâtées par le gain ;
- devaient être respectueuses des objets dérobés ;
- et bien sûr le café Cat’s Eye se devait d’être un élément central de cette nouvelle histoire.
Le thème du "gentleman cambrioleur" reste très populaire au Japon, notamment depuis 1967 et la diffusion du manga Lupin III de Monkey Punch (1937 - 2019). Les sœurs Cat’s Eye appartiennent à ce répertoire ; un long-métrage crossover entre ces 2 licences est ainsi sorti en 2023, à l'occasion des 50 ans du 1eranime de Lupin et les 40 ans du manga Cat’s Eye (disponible sur Prime Video).
Une préquelle moderne et parisienne
Avec la série de TF1, on assiste en quelque sorte à la préquelle du manga mais avec quelques libertés prises par les scénaristes et producteurs français. De cette façon :
- l'histoire prend place dans un Paris contemporain au lieu de Tokyo du début des années 1980 ;
- le café/restaurant est géré par le compagnon de l'aînée et non par la fratrie ;
- les sœurs sont légèrement plus âgées (toutes majeures) et ont une vie plus "normale" ;
- elles ne ressemblent pas exactement physiquement aux dessins originels, notamment concernant la couleur des cheveux, excepté pour le personnage de Tamara où l'actrice Camille Lou porte une longue perruque brune ;
- le policier Quentin Chapuis est séparé de Tam au début de la série et en couple avec sa coéquipière Gwen Assaya ;
- et certains rôles se sont féminisés, tels que ceux de Durieux et du commissaire joués respectivement par Carole Bouquet et Juliette Plumecocq-Mech.
On reconnaît un choix de casting efficace pour le trio principal : Camille Lou, Constance Labbé et Claire Romain s'avèrent crédibles en sœurs intrépides, à la recherche des tableaux de leur père déclaré mort dans l'incendie de sa galerie 12 ans plus tôt.
En revanche, on reste un peu moins convaincus par Élodie Fontan qui tient le rôle de la méchante (vraiment très méchante) prénommée Prudence, qui en fait un peu trop... Et c'est peut-être la principale critique que l'on apporte à cette version française : afin de coller davantage aux goûts de leurs téléspectateurs(trices), la chaîne de télévision joue sur plusieurs registres qui ne s'accordent pas forcément ensemble. Regarde-t-on une série policière sérieuse "à la sauce TF1" ou une adaptation plus fidèle à l'esprit décalé et parfois volontairement absurde du manga japonais ?
Les scènes où le policier Chapuis, aveuglé par son amour pour Tam, ne la reconnaît jamais même en voleuse à peine masquée, et où la méchante Prudence se sort facilement des griffes de la police en se mettant à courir en talons-aiguilles manquent de crédibilité et/ou de second degré. De façon plus générale, les dialogues longs et gentillets rendent l'action de certains épisodes un peu molle.
On relèvera en revanche une certaine tendance au fan service qui, en l'occurence, s'avère plutôt fidèle au manga originel, mais pourrait choquer certains nouveaux téléspectateurs(trices). Ainsi, la caméra a tendance à s'attarder sur les décolletés ou les postérieurs de nos héroïnes, dans des plans parfois longs et insistants. Chacun(e) en tirera son propre avis.
Quoi qu'il en soit, on passe un bon moment à regarder cette nouvelle série française, les monuments de Paris servent joliment de décors et font toujours leur petit effet. Enfin, les nostalgiques du Club Dorothée sont ravis de retrouver la musique du générique français qui a été légèrement remixée mais garde son authenticité des années 1980 : "Filles d'aujourd'hui..."