Tonoharu
BD de Lars Martison
Ça fait un moment que je n’ai pas lu de nouveau manga, mais cette fois-ci je voudrais vous parler d’une nouvelle illustrée, à cheval entre le roman et la BD. Globalement, on est assez proche du manga, à ceci près qu’il s’agit d’une tranche autobiographique de Lars Martison, un auteur américain. Dans Tonoharu, il y raconte son expérience de professeur d’anglais assistant dans la banlieue de Fukuoka.
L’expérience Tonoharu est intéressante dans le sens où elle offre un point de vue peu commun de l’expatrié au Japon. J’aime à rappeler parfois que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs et que le Japon, quelle que soit la passion qu’on lui voue, n’est certainement pas exempt de défauts. Lars en fait une démonstration fascinante à travers lui, pleine de retenue sur une année passée entre ennui et incompréhension.
La finesse de son récit se situe justement dans cette absence de culpabilisation d’un côté comme de l’autre. Nul n’est en cause : ni un Japon qui par un mélange de politesse, flemme et complexe, ne va pas chercher à l’intégrer, ni ses accointances gaijin dont on ne sait pas vraiment non plus ce qu’elles font dans le Kyushu, ni lui-même comme bloqué dans sa timidité et inadapté à tout.
J’imagine que certains lecteurs auront envie de secouer ce protagoniste apathique, plus proche des Japonais qu’il ne le croit en ce sens qu’il cherche surtout à fuir toute responsabilité et à laisser couler le flot d’un déroulement bien écrit. Pourquoi ne pas apprendre le japonais ? Pourquoi ne pas s’intéresser plus à cette culture ?
Mais finalement, c’est ce détachement et cette dépression qui font l’étrange attrait de Tonoharu, un peu comme Lost in Translation. Lars n’est pas plus en faute qu’un Japonais ne le serait plongé dans son cas. De la même manière, le Japon ne semble pas tant en cause que le personnage de Lars ne l'est, et il ne s'en cache même pas. La fin du premier tome ouvre sur une possibilité d’évolution notable sur son cas. C’est avec plaisir, donc, que je lirai la suite.