Tri sélectif et recyclage au Japon
Déchets japonais, ordures et poubelles
Une chose qui peut surprendre les touristes occidentaux au Japon, c'est le traitement minutieux apporté aux ordures, autrement dit la gestion du recyclage des déchets. Depuis un bon moment, les Japonais séparent deux types de déchets (ゴミ / "gomi") : les combustibles (燃える / "moeru") et les incombustibles (燃えない / "moenai"). Au fur et à mesure, de nouvelles catégories sont apparues, parmi les plus connues, évidemment :
- カン / "kan" : les canettes ;
- ビン / "bin" : les bouteilles en verre ;
- ペト(ボットル) / "pet (bottle)" : les bouteilles en plastique.
Ces trois inscriptions sont bien connues de tous les visiteurs et expatriés au Japon, car on les trouve à côté de beaucoup de distributeurs automatiques, autant dire tous les vingt mètres.
Mais elles signalent également autre chose : les poubelles globales pour tout ce qui n'est pas recyclable, autrement dit ce qui ne rentre pas dans une case (その他 / "sonohoka"), sont bien plus rares. Et la propreté des rues au Japon n'encourage personne à jeter ses détritus par terre.
Qui n'a jamais gardé un emballage de gâteau toute la journée dans sa poche, ou même un papier de chewing-gum pour le remettre dedans lorsqu'il n'aura plus de goût ? Pas bien grave lorsque l'on est en vacances, mais en allant plus loin, demandez à n’importe quel Japonais ou expatrié : il aura forcément au moins une anecdote à vous raconter sur ses déchets.
En tant que particulier, le tri des ordures est encore plus contraignant. On distribue aux résidents des livrets précis, qui font parfois plusieurs dizaines de pages, pour expliquer où doivent aller chaque type de déchet. Pour faire les choses dans les règles, il faudra également se munir d'un mètre-mesureur, d'une balance et bien connaître les différents articles. Et avec l'utilisation des sacs-poubelle transparents, on vous surveille au quotidien.
Exemple chez un ami à Osaka : pour se débarrasser d'un encombrant, en l'occurrence une valise cassée, il a fallu passer quinze minutes au téléphone 📱 pour prendre un rendez-vous avec l'entreprise d'enlèvement quinze jours plus tard (rappelez-vous : au Japon, il n'y a pas de nom de rue...). Mais au préalable, il faudra aller acheter 200Y un autocollant spécial et nominatif à coller sur l'objet, que l'on ne pourra descendre dans le local à poubelles que la veille au soir du rendez-vous prévu. Et gare aux écarts de conduite ! Si vous ne souhaitez pas garder la valise deux semaines dans votre petit appart' et la descendez trop tôt, un voisin se chargera de vous la remonter, voire de vous dénoncer...
Nous sommes les premiers à favoriser le recyclage des déchets et à trier nos ordures. Cela nous paraît un geste citoyen éco-responsable, indispensable pour l'avenir. Au Japon, on aime à faire prendre conscience de l’importance du tri sélectif, après tout tant mieux. Mais là où ça devient compliqué, c’est quand on a l'impression d'avoir des bâtons dans les roues. A Tokyo on est généralement bien élevé, mais plus au sud dans le Japon on en connaît plus d'un qui, lassé, a carrément abandonné le tri et utilise des sacs opaques pour ne pas être fliqué.
C'est, évidemment, impossible dans les petits villages où tout le monde se connaît. Certains quartiers tournent alors à la récompense. Si votre tri de journaux et magazines est bien fait, on vous le rendra en... papier toilette !
La gestion du plastique au Japon
Plus globalement, le recyclage au Japon a créé un réseau dense où ce ne sont pas seulement des entreprises privées qui livrent une guerre de territoires et de types de déchets à l’État japonais. Des micro-sociétés entières, de SDF ou de retraités dont la pension ne suffit pas, se sont constituées pour trier les ordures et les apporter au plus offrant.
Et à l'international, le Japon garde son image de bon élève du recyclage. D'après le Plastic Waste Management Institute, le Japon recyclerait ainsi environ 77% de ses déchets plastiques. Toutefois, plus de la moitié de ce recyclage serait en fait de l'incinération... De plus, il reste un énorme producteur (le deuxième au monde) et parfois de manière exagérée, comme aime à le montrer ce compte Instagram.
En juin 2019, la chaîne de konbini 7-Eleven annonce remplacer le mois suivant le plastique autour des ses onigiri 🍙 (2,27 milliards vendus chaque année !) par un bio-plastique.
Depuis avril 2020, le gouvernement a interdit la gratuité des sacs plastiques en caisses des konbini afin de réduire les déchets plastiques. Il passent en moyenne à 5¥ (~0,03€) et de nombreux japonais passent à l' "eco-bag" ou "tote-bag", le sac réutilisable en tissu.
Depuis avril 2022, les grandes entreprises japonaises sont obligées de recycler leurs déchets. En 2018, sur 8,91 millions de tonnes de déchets plastiques au Japon, 4,62 millions provenaient des entreprises, et la majorité étaient incinérées...
Ce même mois, les magasins ne doivent plus fournir de couverts en plastique gratuitement sous peine d'une amende pouvant aller jusqu'à 500.000¥ (~3.067€).
Le Premier ministre Yoshihide Suga annonce en octobre 2020 vouloir rendre le Japon neutre en impact carbone à l'horizon 2050.
En mars 2024, les Japonais continuent de jeter en moyenne 183 bouteilles en plastique "pet" chaque année, ce qui est le record mondial. La grande entreprise française Veolia implante sur le territoire une nouvelle usine pour valoriser davantage ces déchets.