Shibamata (Tokyo), exposition chez un commerçant de son râteau porte-bonheur Kumade

Kumade

Les râteaux de la prospérité pour l'année à venir

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Kumade désigne les râteaux ornementaux porte-bonheur que les Japonais achètent à chaque changement d'année pour se souhaiter prospérité et bonne fortune professionnelle ou familiale. On les retrouve en vente lors de matsuri saisonniers organisés par les sanctuaires à travers le Japon, notamment pendant les foires Tori no Ichi qui ont lieu les jours du coq en novembre, particulièrement à Tokyo.

En japonais, le mot 熊手 kumade désigne un râteau ou un large peigne à dents dures, utilisé pour rassembler les feuilles mortes tombées par terre dans les parcs et jardins. Selon sa transcription en caractères kanji, kumade signifie littéralement "la main de l'ours" et il s'agit également d'un geste de karaté, où l'on vient griffer au visage son adversaire comme une patte d'ours.

Dans le shintoïsme, le râteau dit "ornemental" baptisé kazari kumade est un talisman qui protège la famille et permet de se souhaiter richesse et réussite professionnelle pour l'année à venir. On le retrouve ainsi à la vente en tant que porte-bonheur spirituel dans les matsuri organisés par les temples et sanctuaires pendant toute la période du changement d'année : de novembre pour Tori no Ichi jusqu'au 3 février et la célébration de Setsubun, qui marque le début du nouveau calendrier traditionnel des 72 saisons au Japon.

Myoho-ji (Fuji City), vente de râteaux Kumade pendant le festival Bishamonten Taisai

Devenu populaire auprès des commerçants pendant l'époque Edo (1603 - 1868), le kumade décoratif s'achète parfois à prix d'or pour ensuite être exposé en boutique et garantir ainsi de bonnes affaires à son prioritaire. Chaque année, la tradition veut que l'on s'en procure un nouveau de plus grande taille que celui de l'année précédente ; de cette façon, le râteau sera en mesure de "collecter plus de sous".

Souvent imposants et hauts en couleurs, ces objets traditionnels shinto constituent une belle décoration chez soi et rivalisent de créativité afin de séduire le maximum d'acheteurs. Lorsqu'une vente est réalisée, on assiste en général à des applaudissements traditionnels baptisés ippon-jime (一本締め), c'est-à-dire composés de 3 séries de 3 applaudissements et d'un dernier coup (3-3-3-1).

Fabriqué en bambou, le râteau kazari kumade est orné de multiples objets symboliques porte-bonheur au Japon, tels que :

  • les pièces d'or japonaises koban ;
  • le masque souriant de la déesse Okame ;
  • les Daruma ;
  • les Maneki-neko ;
  • les statues des divinités Ebisu et Daikokuten associés à la bonne fortune ;
  • la nourriture en offrandes (barils de nihonshu 🍶, sacs tressés de riz, etc.) ;
  • les représentations de poissons (carpes koi, daurade), de grues tsuru, de tortue ;
  • et les branches de pin matsu, de bambou ou de fleurs saisonnières typiques au Japon.

En tant que touristes, on peut facilement trouver des versions plus petites, transportables et moins chères ; compter à partir de 1.000¥ (~6,08€) en moyenne le kumade "de poche".

Koto (Tokyo), vente de porte-bonheur Kumade au Naritasan Fukagawa Fudo-do en janvier

Les matsuri festifs liés à la bonne fortune

Au Japon, les râteaux kazari kumade sont mis en vente chaque fin d'année pendant les matsuri des sanctuaires liés à la prospérité. L'ambiance festive et conviviale qui s'en dégage ressemble à celle des foires où la foule se rassemble, plutôt en fin de journée / début de soirée et les week-ends, pour :

  • assister au spectacle de la vente des kumade les plus impressionnants ;
  • rapporter son porte-bonheur de l'an passé pour qu'il soit brûlé (rituel de purification) ;
  • acheter son nouveau talisman pour l'année à venir ;
  • et profiter d'être sur place pour se restaurer auprès des stands de rue yatai installés également pour l'occasion.

Tori no Ichi : la fête du coq à Tokyo

La capitale japonaise est connue pour être l'une des premières destinations japonaises à vendre les kumade pour l'année à venir : au moment de Tori no Ichi (酉の市), qui désigne le matsuri du coq, une fête particulièrement célébrée à Tokyo depuis l'époque Edo et en lien avec le héros légendaire Yamato Takeru no Mikoto.

Chaque mois de novembre, pendant les jours du coq (tori no hi) selon l'astrologie chinoise, les marchés en plein air Tori no Ichi prennent place au sein des enceintes shinto de la ville, dont les principales sont :

On retrouve également les matsuri Tori no Ichi au sein :

Asakusa (Tokyo), enceinte du temple Chokoku-ji en début d'année

Selon les années, on compte 2 à 3 jours du coq en novembre. En 2024 (6ème année de l'ère Reiwa), il y a 3 jours du coq, à savoir :

  • le 1er jour : Ichi no Tori (一の酉) qui a lieu mardi 5 novembre ;
  • le 2ème jour : Ni no Tori (二の酉) qui se déroule le dimanche 17 novembre ;
  • et le 3ème jour : San no Tori (三の酉) qui est programmé le vendredi 29 novembre.

Il est dit que les années où il y a un 3ème jour du coq ne sont pas les meilleures pour apporter la bonne fortune pour l'année à venir ; traditionnellement on redoutait les incendies. De cette façon, il est toujours recommandé de privilégier les 2 premiers journées du coq pour se rendre aux foires Tori no Ichi et y faire ses emplettes.

Les autres festivals autour du Nouvel An

Au-delà de Tokyo et de ses foires Tori no Ichi en novembre, de nombreux festivals ont lieu à travers le Japon pour célébrer la nouvelle année. Qu'ils soient organisés en décembre ou en janvier, on peut s'y procurer différents porte-bonheur traditionnels tels que les râteaux kumade, les poupées daruma, les raquettes ornementales hagoita ou encore les flèches décoratives hamaya.

Koto (Tokyo), foule du début d'année au Naritasan Fukagawa Fudo-do en janvier

On peut citer les matsuri suivants :

  • Maebashi Hatsu-ichi Matsuri (前橋初市まつり) qui a lieu le 9 janvier au bord de la route 50 et au sanctuaire Hachiman-gu du centre-ville de Maebashi, dans la préfecture de Gunma au nord-ouest de Tokyo.
  • et le populaire festival Toka Ebisu (十日戎) qui se déroule du 9 au 11 janvier au sein du sanctuaire Imamiya Ebisu-jinja à Osaka.

Et pour celles et ceux qui seraient au Japon le 4 janvier, ce 1er jour de travail de l'année fait souvent l'objet d'une visite au sanctuaire proche de son entreprise, à l'image du Kanda Myojin à Akihabara qui accueille à cette occasion de nombreux salarymen et vend des kazari kumade pour la prospérité à venir.

Mis à jour le 05 novembre 2024