Suigian

Présenté par son propriétaire Hidetomo Kimura comme un lieu unique à la frontière entre restaurant, bar lounge, salon de thé et salle de théâtre, le Suigian ne manque pas d'originalité parmi l'offre d'établissements de divertissements pléthorique que compte la capitale nippone. Plus qu'un menu gastronomique, les clients, qu'ils soient japonais ou étrangers, viennent en ces lieux pour vivre une expérience culturelle hors du temps.

L'établissement réussit à concilier performances théâtrales traditionnelles et dégustation de la cuisine japonaise de style kaiseki, le tout dans une atmosphère raffinée et détendue. Cachée au sous-sol du sanctuaire Fukutoku, la salle en elle-même se révèle assez cosy, sous des lumières tamisées, avec des sièges confortables et une décoration élégante dans des tons chauds. Pas très grande et plutôt intime, elle se prête très bien à un repas-spectacle en soirée. Au centre, on découvre la scène de théâtre dont les nombreux éclairages hypnotisent agréablement le spectateur. Non loin, le bar à la japonaise ajoute au côté chic de l'adresse. Sur l'un des murs, on aperçoit plus de 80 masques 😷 utilisés dans le théâtre Nô (Noh).

Démocratiser le Noh et le théâtre traditionnel

Lieu de découverte culturelle et de partage, le Suigian rend abordable l'art scénique japonais ancestral. Sans perdre en terme de qualité puisqu'il s'agit d'acteurs professionnels reconnus, les représentations sont d'abord introduites en anglais puis raccourcies dans la durée afin d'être comprises par le plus grand nombre. Cela constitue donc une bonne première approche pour les néophytes curieux.

Différents styles de pièces sont joués :

• on assiste fréquemment à des représentations traditionnelles de Nô ;
• de théâtre de poupées Bunraku ;
• mais également de théâtre comique Kyogen ;
• des performances musicales sont aussi données telles que les danses nihon-buyo ou rituels shinto kagura ainsi que des démonstrations plus modernes autour du jazz ;

Un seul type de représentation est programmé par jour mais l'établissement, ouvert tous les jours, fait souvent varier son affiche, également en fonction des saisons. Par exemple, on peut régulièrement voir une mise en scène de théâtre Kyogen entre un samourai et deux de ses serviteurs où le premier tente, lors de son absence, d’empêcher les deux autres de boire son saké 🍶 en cachette. Ce genre de pièce est volontairement joué avec des gestes plutôt exagérés et des expressions de colère ou de rire typiques et très codifiées. Grâce à l'explication en anglais, le comique de situation opère et l'on comprend l’essentiel de l'histoire.

Le spectacle visuel se montre également au rendez-vous, où l'on admire les costumes et masques traditionnels hauts en couleurs. De même, les femmes qui pratiquent le nihon-buyo sont vêtues de sublimes kimonos qui font écho au raffinement des geisha. Parfois utilisées, les projections de mapping vidéo ou lightmap s'intègrent parfaitement au décor traditionnel. On apprécie par ailleurs le jeu des éclairages de la scène qui permet notamment d'annoncer en douceur le début de la pièce. Il est temps de poser ses baguettes afin de profiter pleinement du spectacle.

Découvrir la cuisine japonaise au rythme des 72 saisons

Depuis son inauguration en 2018, le restaurant du Suigian a fait évoluer sa carte et propose désormais des menus complets de style kaiseki, élaborés suivant l'ancien calendrier des 72 saisons au Japon. Ces plats mettent à l'honneur la cuisine traditionnelle japonaise à base de produits frais et locaux, notamment dans le choix des poissons 🐟 et des légumes.

En savoir plus :

Koyomi : les 72 saisons du Japon - L'ancien calendrier de l'archipel

Servis uniquement le soir pendant le spectacle, les menus respectent également le concept rythmique du théâtre Nô, baptisé Johakyu (序破急) et divisé en 3 temps, où l'on commence par manger lentement, puis l'on accélère la cadence pour terminer rapidement. On retrouve cette même recherche exceptionnelle du détail au niveau de la carte des cocktails : chacune des 72 micro-saisons est ainsi illustrée par une boisson particulière, en version avec ou sans alcool.

Des assiettes à la carte sont par ailleurs disponibles. On y retrouve, entres autres, une cuisine inspirée de l'ancienne Edo (future Tokyo), par exemple :

• Le plateau de sushi de style edomae-zushi (江戸前寿司) s'avère joliment présenté. Le riz se montre plus foncé que d’ordinaire car il est cuisiné comme à l'époque ; quant au poisson cru, il fond à merveille dans la bouche.
• Le thé matcha 🍵 agrémenté de petites pâtisseries valent également le détour.

À noter qu'il est également possible de réserver une cérémonie du thé.

Le cadre chic du Suigian sied parfaitement au quartier historique de Nihonbashi et l'on passe un agréable moment divertissant plongés dans l'esthétique classique japonais, où l'art et la nourriture forment un équilibre parfait. Bien expliquée, la soirée se déroule de manière conviviale où chacun peut participer et interagir avec le personnel.