Anecdotes de voyage au Japon
Carnet de voyage Japon (2003 #13) : Impressions générales et histoires
Pour notre dernier article de cette longue série, nous vous proposons plusieurs petits paragraphes indépendants les uns des autres, chacun traitant d'une anecdote amusante, intéressante ou surprenante.
Du Japon…
Où tout le monde joue
Quel que soit l'âge, le sexe ou la condition sociale, tout le monde ira insérer sa pièce de 100 Yen 💴 dans une machine pour quelques minutes de plaisir. Mais ceux qui impressionnent le plus ne sont autre que les salary men. Avec leur apparence plutôt sérieuse et froide, serrés dans leurs costards, difficile de les imaginer quelques minutes après la fin de leur travail, la cravate un peu desserrée et la mallette posée devant les pieds, au Game Center du coin, assurant comme des bêtes sur des Beatmania, Taiko no Tatsujin ou autres Pop'n Music. Et pourtant, ce sont bien eux qui sont là, devant nos yeux ébahis, à enchaîner sans la moindre erreur les niveaux de difficulté les plus élevés de ces jeux musicaux. D'autres, plus calmes, animeront les duels aux cartes de Avalon no Kagi, ou vivront des matchs de folie sur une borne géante où chacun doit diriger un joueur. A moins bien sûr qu'ils ne dilapident leurs salaires dans les toujours très prisés Pachinko et autres Slot Machines. Décidément, sous des apparences strictes, le salary man moyen est joueur, et quel joueur ! Preuve s'il en fallait encore qu'au Japon, vraiment tout le monde joue.
Où l'on dort dans le métro
Les japonais qui s'endorment dans le métro 🚇 sont légion. L'on pourrait même avancer qu'à partir de 20h, il est difficile de trouver une rame de la Yamanote dans laquelle personne ne dort. De mémoire, je n'ai vu personne dormir debout. En revanche, le fait de s'asseoir est quasiment fatalitaire. C'est un spectacle hilarant que de voir deux japonais qui luttent contre le sommeil mais dont les têtes se rapprochent dangereusement l'une de l'autre, puis s'écartent, et continuent ce manège jusqu'au choc qui les fera se réveiller quelques secondes voire s'excuser. Steeve a même subi une fois les affres d'un salary-man éreinté qui lui a fait ses avances noctambules. J'ai pour ma part moi-même bien vite pris le pli, et je ne compte plus le nombre de fois où je me suis endormi pendant les trajets en métro, réveillé plus ou moins délicatement par l'ami Julien. Reste que je n'aurai pas mastérisé la technique ultime dont les japonais conservent encore farouchement le secret : se réveiller pile à la bonne station après une demi-heure de sommeil. Tout simplement ahurissant !
Où l'on apprécie les conbini
Je n'aurai jamais autant apprécié les épiceries de quartier qu'au Japon. Fidèles à leur réputation, ces convenient stores contractés phonétiquement proposent une quantité incalculable de produits, dans une diversité des plus surprenantes. Jeux vidéo 🎮 sont côte à côte avec toutes sortes de nourritures et boissons ; manga et magazines font face aux produits pour l'hygiène. Invention la plus géniale : le rayon chauffant qui propose les boissons directement à point. Absence la plus remarquée : les serviettes hygiéniques et tampons, laissant planer le doute sur une population féminine finalement peu sujette aux modifications hormonales. Reste que le plaisir d'aller chercher son bentô à quatre heures du matin n'a pas de prix.
Où le "ecchi na no wa ikenai to omowanai"
Dans ces mêmes conbini, le rayon lecture laisse échapper quelques bourdes. Entre les magazines de jeux vidéo, les manga et les magazines féminins (dont l'épique "Wansankan", équivalent de notre "Vingt Ans") se trouvent évidemment des magazines de charme, plus ou moins de bon goût. Seulement, différence notable avec nos contrées : ils sont disposés à environ un mètre vingt de hauteur, à disposition de tous, même des enfants. Ce ne sont de toute façon pas eux qui les lisent ; la place est généralement déjà prise par un salary-man désabusé… voire un occidental en manque !
Où l'on ne s'étonne plus de la minceur des silhouettes
Chères lectrices, sachez qu'au Japon les femmes de tous âges font montre d'une taille de guèpe et de mensurations de mannequins. A tel point que, comme le faisait remarquer Julien, nous nous sommes demandés plusieurs fois, étudiant scientifiquement la question sont tous ses angles, comment un bébé pouvait se constituer et sortir du ventre de la plupart des femmes. Encore un mystère tout japonais, bien gardé derrière ces minois angéliques. Reste que la poitrine va de pair (-e ?) avec la taille et le poids ; vengez-vous mesdemoiselles ! Pourtant, si toutes les femmes nippones ne sont pas belles et minces, j'ai curieusement trouvé en rentrant en France, l'espace de quelques jours, que j'habitais un pays de gros moches…
Où la mode des kogyaru a tourné
L'on connaissait la jeune japonaise d'il y a quelques années, brûlée aux ultra-violets et tracée de blancs sur les contours (un pré-cellshading ?). Aujourd'hui, il semblerait que cette race ait presque entièrement déserté les rues Tôkyôïtes, au profit d'une mode plus sobre et sans doute plus occidentale. Nos yeux avertis auront tôt fait de déceler le ton à la mode pour les cheveux : châtain foncé / marron. Peu d'extravagances dans les chevelures désormais ; les décolorées et autres peroxydées se font rares. Seul accessoire indispensable pour les jeunes filles : les bottes de cuir, marron de préférence (pour s'accorder avec la coiffure ?), avec leurs talons hauts qui claquent en rythme au fur et à mesure du trajet. Plus discret et moins vulgaire qu'en Europe, pourtant, par on ne sait quel miracle bridé.
Où le sake est plus traître qu'il n'y paraît
Déçus des horaires de métro qui n'auront pas pu nous permettre de sortir en boîte de nuit, nous étions fermement décidés avec Julien à parcourir les deux derniers kilomètres nous séparant du New-Koyo 🍁, du sake plein la gorge. Rentrant dans le premier combini sur le chemin, je demande au caissier, qui m'indique qu'il ne vend pas d'alcool, mais que le combini d'à-côté, lui, pourra étancher notre soif. Rebelote dans la boutique indiquée : l'employé me déroule le tapis rouge et m'explique tout ce qu'il vend, me situant les rayons. Soit. Après réflexion, nous avons finalement pris chacun une canette 50cl de sake au citron. En sortant, après l'inévitable "Kanpai!", de bonnes gorgées gouleyantes nous déçoivent : on nous aurait vendu du Fanta déguisé ? En relisant bien la canette, pas d'erreur, le kanji "sake" est bien présent. Déçus de la dose présente, nous marmonons quelques minutes avant de nous apercevoir que nous sommes bien rapidement grisés par ces traîtres canettes. Fiers que nous étions, quelque part, d'imiter les salary-men l'espace de quelques heures.
Où le New-Koyo déborde de bizarreries
Mis hors compétition ceux qui y habitent à l'année, et celle qui n'aimait pas le Japon pensant y retrouver ce qu'elle avait vu en Afrique, le New-Koyo recèle de phénomènes. L'anecdote la plus amusante à raconter reste pourtant celle des Suédoises. Le soir de la cuite au sake-citron, nous rentrons bruyamment dans nos chambres à l'auberge. Steeve nous souhaite bonne nuit depuis déjà dix bonnes minutes, lorsqu'une porte s'ouvre violemment de l'autre côté du couloir, et une Suédoise en tee-shirt et petite culotte débarque comme une furie. Elle lui hurle des insultes en Suédois, auxquelles Steeve rétorque ni une ni deux, se retournant vers nous : "quelqu'un parle Suédois ici ?". La fille lâche un méchant "Je veux dormir !" et s'en retourne dans sa chambre aussi vite qu'elle en est sortie. Je ne vous raconte pas l'hilarité pour toute la nuit et le reste du voyage…
Où le portable est roi
A croire que le nippon aime l'uniformisation qu'on lui impose pourtant souvent : tous âges, sexes, classes confondus, le téléphone 📱 portable sera gris, repliable, Sony Ericsson et Vodafone. Tout du moins neuf fois sur dix. C'est toujours un spectacle surprenant que de voir toutes ces têtes baissées simultanément, rivées sur leur écran, pianotant un mail ou se délassant sur Tetris, avant de refermer leur bestiole, laissant échapper l'inévitable "clac" fédérateur de leur keitai. Un son qui marque, tant il sera entendu l'espace d'une seule journée. Amusants aussi sont la quantité de straps et autres dérivés (porte-clés, figurines voire poupées) accrochés à chaque portable. La miniaturisation n'est qu'industrielle, l'individualité rend de suite le portable moins pratique !
Où les pompiers et policiers déploient encore et toujours
Mimique toute japonaise encore une fois : le déploiement impressionnant des forces de police ou du feu 🔥 pour la moindre petite intervention. Par exemple, pour une déviation ou une route barrée un soir, j'ai vu un camion, une moto et une demi-douzaine d'hommes mobilisés pour faire la circulation. De même le dernier soir, à Shibuya, Julien et moi-même nous sommes assis face à un immeuble dans lequel un léger incendie avait apparemment eut lieu. A moins que ce ne fût l'alarme qui s'était déclenchée par erreur… Bref, le spectacle principal résidait surtout dans le déploiement d'une petite dizaine de véhicules de pompiers, et du nombre impressionnant d'hommes présents sur les lieux. L'on comprend d'ailleurs mieux le pourquoi du si peu d'animaux de compagnie à Tôkyô : imaginez le boulot lorsque les chats 🐈 restent bloqués en haut des arbres !
Où la population fume
Dans ce pays où les règles sont souvent respectées à la lettre et où la déviance doit généralement être évitée voire masquée, j'ai été surpris de voir autant de personnes fumer. La tranche concernée se limite visiblement aux actifs, généralement pas avant vingt ans et pas après cinquante. A plusieurs reprises nous avons constaté, par ailleurs, que les fumeurs japonais pouvaient écraser leur cigarette à peine commencée. Mais de toute façon, pour que cette forme de déviance soit tant bien que mal réglementée, le gouvernement installe des "smoking areas" en plein air, le plus impressionnant étant bien sûr qu'elles sont respectées !
Où le parapluie éborgneur n'existe pas
A Tôkyô, neuf personnes sur dix qui possèdent un parapluie ont un modèle similaire : manche blanc et toile transparente. Logique, il est vendu partout pour deux cents Yen ! En cas de pluie ☔️, nous avions de quoi craindre le pire, compte tenu de la population amassée dans cette mégalopole. C'était sans compter le talent incroyable dont fait preuve le nippon pour éviter de gêner voir blesser son prochain : dépendamment des situations, il pourra s'arrêter, décaler son bras ou le lever, entre autres. C'est alors un spectacle assez amusant que cette chorégraphie quasi rythmique de la danse des parapluies.
Où l'on est amoureux
J'ai toujours cru que les japonais même jeunes, lorsqu'ils se promènent en public avec leur compagne ou compagnon, se comportaient comme s'il s'agissait d'un ami. Comme si l'amour était tabou, aux yeux de tous. Reste que pendant notre voyage, présence occidentale remarquée ou pas, les couples amoureux n'étaient pas rares, main dans la main ou dans les bras l'un de l'autre. Pour les baisers, c'est une autre histoire. L'on en voit, mais furtivement. Il ne faudrait tout de même pas exagérer non plus !
C'est donc sur cette suite d'anecdotes et d'impressions que s'achève le long et scindé compte-rendu de notre voyage au Japon. Je remercie ceux qui nous ont lu jusqu'au bout et je vous donne rendez-vous lors de notre prochaine escale au pays du Soleil Levant !
A lire aussi : d'autres anecdotes de voyage au Japon racontées suite à mon voyage du printemps 🌸 2010.