Kameido Tenjin
Les glycines à l'honneur dans la ville basse de Tokyo
Kameido Tenjin est un sanctuaire situé dans l’arrondissement de Koto, à l’est de ville de Tokyo. Consacré à Sugawara no Michizane, il bénéficie d'une grande popularité tout au long de l'année. Il devient au printemps, quelques semaines durant, une destination incontournable pour la contemplation des glycines en fleurs succédant à la saison des cerisiers, à partir de la mi-avril.
Le sanctuaire Kameido Tenjin fut construit en 1661 à Edo (ancien nom de Tokyo) en l’honneur de Sugawara no Michizane (845 – 903), un remarquable homme politique et érudit japonais de l’époque de Heian qui reçut le titre élevé de "Directeur des études" (daigaku no kami 大学の頭) à la Cour Impériale.
Ayant pris la défense de l’empereur Uda dans un conflit de succession, il fut accusé de complot par le clan Fujiwara qui le rétrograda à une place de moindre importance et l’exila sur l'île de Kyushu à Dazaifu, où il mourut rapidement. Les années qui suivirent son décès connurent une succession de calamités : sécheresses, incendies ainsi que de la mort d'un fils de l'empereur Daigo, qui furent attribuées à l'esprit courroucé de Michizane.
Un sanctuaire tenman-gu à la filiation ancienne
Le sanctuaire shintoïste Kitano Tenmangu dédié à sa mémoire fut donc construit à Kyoto afin de l’apaiser, et Michizane lui-même déifié sous le nom de "Tenjin-sama". Ce fut le premier d’une longue lignée d'autres sanctuaires édifiés par la suite et consacrés à l'érudit dans tout le pays, dont fait partie le sanctuaire Kameido Tenjin de Tokyo.
Les bâtiments actuels furent reconstruits dans les années suivant la Seconde Guerre mondiale, après avoir subi les ravages des bombardements aériens. De nos jours, l’entrée se fait toujours par un imposant torii ⛩️ rouge trônant dans un petit quartier résidentiel et paisible de la ville basse de Tokyo (shitamachi). On vient y prier pour la santé des enfants et la réussite scolaire notamment.
Kameido Tenjin reproduit l’agencement du sanctuaire modèle Tenmangu de Dazaifu à Kyushu. Le torii ouvre sur ligne droite menant au pavillon principal honden, après avoir traversé 3 ponts au-dessus d’un étang auquel a été donnée la forme du caractère 心 (kokoro ou shin) signifiant "le cœur", tant physique que spirituel.
Trois ponts japonais pour accéder au kami
L’omniprésence de la verdure associée aux éléments architecturaux donne un aspect merveilleux aux lieux. Le chemin jusqu’au honden et la succession de ponts symbolisent le déroulement de la vie humaine. Emprunter cet itinéraire permet au visiteur de purifier son âme avant de se présenter devant le dieu kami et lui adresser sa prière.
Les trois ponts, dont deux de type taiko-bashi, c’est-à-dire en forme de demi-lune, marquent des étapes dans la purification :
- Le premier pont est un taiko-bashi de pierre aux rambardes rouge vermillon. Il est nommé Otoko-bashi ("le pont des hommes") et représente la portion de vie écoulée, le passé.
- Le deuxième est un pont plat, nommé Hira-bashi ("le pont plat"), qui représente le présent.
- Le dernier pont est un taiko-bashi similaire au premier. Il est nommé Onna-bashi ("le pont des femmes") et représente l‘avenir et les espoirs qu’il porte.
Le célèbre peintre d’estampes ukiyo-e Utagawa Hiroshige (1797 - 1858) immortalisa le sanctuaire et son pont Otoko-bashi dans sa série des Cents vue d’Edo, celle-là même qui inspira Claude Monet. Aujourd’hui encore, le sommet de ce pont offre une superbe vue sur l’ensemble des espaces verts et d’eaux, ainsi que sur le bâtiment principal honden, avec pour toile de fond moderne la Tokyo SkyTree.
Les glycines du printemps à l'honneur du festival Fuji Matsuri
Le temps fort de la saison des festivals a lieu au printemps 🌸, au moment de fêter Fuji 🗻 Matsuri, le festival des glycines. Le pont Hira-bashi devient le lieu d’observation privilégié d’un paysage merveilleux constitué de myriades de grappes de fleurs de glycines en fleurs de la mi-avril à début mai.
Les branches de la cinquantaine d’arbres sont étendues sur des pergolas judicieusement disposées, de part et d’autre du pont, apportant des teintes mauves et bleutées au cœur du sanctuaire. Lors des nocturnes, les illuminations des fleurs suspendues agitées par la brise ajoutent une touche de féerie et évoquent un sentiment éphémère.
Un sanctuaire animé tout au long de l’année
De nombreux festivals rythment la vie du sanctuaire, dont les allées périphériques sont souvent peuplées de stands typiques de ces événements et proposant principalement de la gastronomie de rue. C’est l’occasion de se régaler de crêpes salées okonomiyaki, de nouilles sautées yakisoba, ou de boulettes de poulpe takoyaki 🐙 dans un cadre idyllique, certains stands offrant même quelques places assises.
Lors de la Golden Week début mai, le sanctuaire accueille quelques concerts d’instruments traditionnels tels que :
- le koto (ou harpe japonaise),
- le shamisen Tsugaru (un luth à trois cordes),
- le Wadaiko (tambour japonais),
- mais aussi de la danse traditionnelle shinto Mikomai.
La visite du sanctuaire Kameido Tenjin saura surprendre par sa beauté tout au long de l’année. En dehors du Fuji Matsuri, deux autres festivals floraux notables ont lieu en février et en octobre, respectivement consacrés aux pruniers (Ume Matsuri) et aux chrysanthèmes (Kiku Matsuri).